Big data in het Les big data dans les cabinets d’avocats

William Visterin (Pulse)

Comment éviter que votre collaborateur passe des heures sur une affaire qui a déjà été analysée? Tuerlinckx Fiscale Advocaten évite de faire deux fois le même travail grâce à une technologie qui favorise le partage des connaissances, ce qui a bouleversé le fonctionnement du cabinet.

Le barreau est sans doute être le dernier secteur à avoir été impacté par l’informatique, tant en matière de fonctionnement que d’efficacité», affirme Jan Tuerlinckx, avocat associé au cabinet d’avocats du même nom spécialisé dans le droit fiscal. «Nous faisons partie des plus grands des petits cabinets d’avocats. Notre cellule fiscale est plus importante que les départements équivalents des grands cabinets », explique Jan Tuerlinckx.

Un cabinet d’avocats se concentre sur des informations à propos de sujets spécifiques. «Ces informations sont accessibles aux personnes qui les utilisent. Il n’est pas rare dans un cabinet que des données soient regroupées dans un dossier ou un fichier soigneusement verrouillé. Dans de nombreux cas, ce n’est pas facile d’y faire des recherches », explique Jan Tuerlinckx.

Il fallait donc rendre ces données plus accessibles. «La première idée? Engager un bibliothécaire capable de classer et d’inventorier toutes ces informations. La subdivision précise est un mode de fonctionnement classique dans notre secteur, mais elle demande beaucoup de main-d’oeuvre et est donc coûteuse. De plus, la personne qui prend en charge ce classement doit être un spécialiste.»

Google au bureau

Problème supplémentaire: les métadonnées associées à certains dossiers. Dans de nombreux cas, les avocats sont eux-mêmes responsables de l’inventaire, comme des labels correspondants. «Sauf que c’est difficile à imposer. Souvent, les avocats travaillent de deadline en deadline. Ils sont soumis à une pression du temps et à une pression commerciale», affirme-t-il. «Dans un petit cabinet de quelques avocats, la communication informelle peut compenser beaucoup de lacunes. Les collaborateurs se racontent ce qu’ils font pendant la pause-café, mais ça se complique quand on est plus nombreux.» C’est pourquoi le cabinet d’avocats a rassemblé ses informations dans un grand dossier avant d’y accoler un outil de ‘text mining’, ou exploration de texte. «Nous avons créé notre Google perso», sourit Jan Tuerlinckx. «Nous utilisons une base de données spécifique pour le partage des informations, laquelle renferme aussi d’autres éléments pertinents comme des e-mails, des travaux de recherche, des conclusions des parties adverses, des articles de journaux ou de revues spécialisées… Elle crée ainsi une base élargie, parallèlement aux dossiers juridiques individuels qui sont conservés.»

Comme chez Google, on obtient une série de résultats sur base de mots-clés. Ces résultats peuvent ensuite être affinés suivant certains paramètres, comme l’auteur, la date ou la nature de l’information juridique.

Travail d'équipe

Outre la technologie, un bouleversement culturel était indispensable. «Nous avons beaucoup travaillé sur notre attitude. Dans un scénario classique, un client est surtout le client d’un avocat qui, lui, opère dans ce plus grand ensemble qu’est le cabinet. Ici, nous préférons voir le client comme le client d’une équipe.»

Dans le cabinet, les clients ont des contacts avec plusieurs spécialisations, et donc avec plusieurs avocats. «Quand nous leur expliquons ces principes, nos clients comprennent immédiatement. Dans notre cabinet, nous travaillons principalement avec des jeunes avocats qui n’ont pas encore intégré l’approche classique des clients individuels typique du barreau. Le partage des données oblige chacun à concéder un peu de rendement personnel au profit de la rentabilité du cabinet. Et cela fonctionne.»

Rédaction modulaire

Le bureau a également introduit la rédaction modulaire. «Quand on introduit un texte dans le système, c’est un peu comme si la technologie participait aux réflexions. Elle va jusqu’à proposer des blocs de texte en se basant sur les informations déjà reprises dans le système, car il se peut que quelqu’un ait déjà rédigé quelque chose de semblable», explique Jan Tuerlinckx.

«Une grande partie de notre travail relève du sur-mesure, mais cela ne signifie pas que certains éléments ne puissent pas être réutilisés. Nous veillons à ce que nos collaborateurs réutilisent la bonne information. Il s’agit de certains paragraphes de texte que nous certifions à cette fin, par lesquels nous établissons la position du cabinet. Nous veillons également à ce que de tels modèles reprennent les informations actualisées et les dernières nouveautés.»

Une autre innovation technologique est décrite par Jan Tuerlinckx comme la surveillance des délais, dans laquelle la technologie peut intervenir. «Le pire cauchemar de l’avocat? Ne pas pouvoir respecter le délai», avoue Jan Tuerlinckx. «Dans ce domaine, nous reconnaissons les documents qui sont soumis à des délais précis. C’est, par exemple, le cas de l’avertissement-extrait de rôle: on n’a que six mois pour introduire une réclamation. Ce document est envoyé dans la boîte de messagerie d’un avocat en vacances? Notre secrétariat l’identifiera très vite.»

Technologie sur mesure

Toutes ces innovations technologiques fournissent des instruments utiles dans un secteur plutôt traditionnel comme le barreau, basé sur le travail sur mesure et les relations personnelles. Les possibilités sont multiples. Jan Tuerlinckx pense à un projet qui permettra d’interpréter des informations en se basant sur un contexte. «Un exemple? Le fisc prend une copie de la comptabilité d’un client pour l’examiner. Suivant le fisc, il y a des irrégularités, mais, sur base du contexte, l’entrepreneur peut démontrer que tout est en ordre. C’est par exemple possible avec les e-mails qui présentent le contexte exact. Certains de ces e-mails ont peut-être trois-quatre ans. Ce type d’information, basée sur le contexte, fait partie de notre ‘text mining’ », explique Jan Tuerlinckx.

L’utilisation poussée de la technologie en général et du ‘text mining’ en particulier peut donc être très profitable à un cabinet d’avocats. Même si cela suppose un bouleversement culturel. «J’ai longtemps pensé que la technologie n’était accessible qu’aux grandes entreprises et aux grands cabinets. Ce n’est pas le cas.»

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